2 facteurs qui expliquent l’augmentation du taux d’alcool dans les vins

augmentation alcool dans le vinSi vous dégustez du vin depuis longtemps, vous avez peut être constaté cette tendance : les vins contiennent plus d’alcool aujourd’hui qu’il y a 20 ans !
A quoi cela est-il dû ?
Est-ce à cause de facteurs externes, ou est-ce un choix délibéré du vigneron ?
C’est de ces questions dont nous allons parler tout de suite.  D’abord, vous en saurez plus sur l’origine de l’alcool dans le vin. Ensuite, je vous donnerai 2 facteurs qui jouent sur la hausse du niveau d’alcool dans les vins. Ce sont des notions à connaître pour mieux comprendre les vins que vous dégustez.

Voici les bases sur le taux d’alcool

A quoi correspond le taux d’alcool ?

Peut-être avez-vous entendu parler de taux d’alcool, de degré d’alcool, de pourcentage d’alcool, de TAV (pour Titre Alcoométrique volumique).
Tout cela, c’est la même chose !

On fait toujours référence au niveau d’alcool, qui correspond tout simplement à la proportion d’alcool (le pourcentage) contenue dans le liquide.

tav vin

D’où vient ce niveau d’alcool ?

Si cela n’est pas assimilé, lisez bien ce qui suit ! Car là, on revoit les bases :).

L’alcool provient toujours d’un sucre, qui a fermenté.
La fermentation alcoolique est effectuée par les levures, qui transforment le sucre en alcool et en CO2.

equation fermentation alcoolique

Plus le raisin est riche en sucre, plus le vin sera riche en alcool.

Ainsi, retenez que 17g de sucre par litre, donne 1% d’alcool.

fermentation vin 17g sucre

Aussi, en mesurant le taux de sucre de notre raisin, on sera en mesure d’évaluer le taux d’alcool dans le vin. Par exemple, un raisin titrant 170g sucre/L sera en mesure de donner un vin de 10% d’alcool (pourvu que l’ensemble des sucres soient convertis en alcool).

Que peut-on en conclure de plus ?

Et bien, le niveau de sucre du raisin dépend de l’ensoleillement, car c’est la photosynthèse qui crée les sucres.
Par conséquent, un taux d’alcool élevé dans le vin est caractéristique d’un climat ensoleillé.

soleil et taux alcool vin

Voilà ce que vous pouvez déduire d’un vin riche en alcool :

ensoleillement et alcool vin

Comme toujours, prenez du recul devant cette généralisation ! Car d’autres facteurs jouent sur la maturité du raisin (et donc le niveau de sucre) : Un millésime ensoleillé, des rendements modérés, une exposition favorable, …

Mais pourquoi le taux d’alcool a-t-il tendance à augmenter ?

Comme je vous disais en introduction, le vin a gagné en alcool au cours du temps : et il n’est pas rare de voir des variations de plus de 2% d’alcool en 15 ans sur une zone donnée.

evolution taux alcool vin au cours du temps

S’il y a plus d’alcool, on en déduit logiquement que le raisin doit être plus riche en sucre, non ?
Et bien oui, si on laisse de côté quelques considérations œnologiques (comme une meilleure maîtrise des fermentations, qui permet d’avoir un meilleur rendement ; En d’autres termes, de « transformer tout le sucre en alcool »)

Nous allons voir tout de suite les 2 facteurs qui jouent sur la hausse du taux d’alcool du vin.

Facteur n° 1 : C’est la faute au réchauffement climatique !

C’est un fait constaté par les experts climatologues. Sur nos vignobles du monde, situés principalement aux latitudes moyennes (écoutez le podcast sur les vins du Nouveau Monde à ce sujet !), la température a augmenté de 2 degrés depuis les années 60.

Du coup, le raisin gagne en maturité, et donc en taux de sucre … d’où l’augmentation du taux d’alcool dans le vin.

Le problème est que le vin produit est plus « lourd » en termes de dégustation.
En effet, sachez que c’est l’effet combiné de ces 2 éléments qui joue sur la lourdeur du vin :

  1. La hausse du taux d’alcool
  2. La baisse du niveau d’acidité

lourdeur vin

Comment contrer ce problème et avoir des vins qui restent « frais » ?

Et bien, on peut anticiper la date des vendanges !
Le raisin sera moins mûr, donc moins riche en sucres.

anticiper date vendange acidite vin

Ainsi, selon les experts de l’INRA, la date des vendanges a été décalée de 2/3 semaines depuis les années 80 !
Cette anticipation des vendanges pourraient se poursuivre, si la température augmente de 2 à 4° sur les 100 prochaines années, comme le prédit l’INRA.

Facteur n° 2 : C’est un choix du vigneron pour répondre à une demande

On peut aussi expliquer cette hausse du taux d’alcool par un choix délibéré du vigneron, dans ses pratiques œnologiques et viticoles.

Et oui, si vous limitez les rendements à la vigne, si vous effeuillez (pour optimiser l’ensoleillement des baies), si vous utilisez des levures exogènes (=ajoutées par le vinificateur) favorisant un excellent rendement de fermentation, le vin sera plus alcoolisé au final !

facteur augmentation alcool vin

Mais pourquoi favoriser ces vins riches en alcool ?
L’alcool apporte en bouche une sensation de gras, il contribue à l’onctuosité du vin, à sa douceur, voire sa sucrosité.
Par défaut, c’est ce que le consommateur recherche ! Un palais non éduqué au vin va spontanément rechercher le gras, au détriment de l’acidité.

C’est normal, nous sommes programmés pour cela, non ?
Par exemple, entre 2 pommes, vous allez croquer dans la plus mûre, et non dans la plus acide.

pomme

Ça tombe bien, car la maturité du fruit vous garantit les vitamines et les nutriments dont vous avez besoin. Bref, nous sommes en quelque sorte biologiquement conçus pour aller spontanément vers le sucre, et non vers l’acidité.
Ce n’est pas un enfant qui dira le contraire 🙂

Une chose encore : Sachez que ce goût pour le gras et la concentration du vin a aussi été porté par Robert Parker. Ce célèbre dégustateur américain a (eu) une influence évidente sur les consommateurs, donc sur les ventes … et a donc poussé les vinificateurs à adapter le vin produit au style voulu.

Récapitulons !

Voici le schéma à avoir en tête !
facteur hausse alcool vin

Je vous parlerai prochainement de techniques pour évaluer facilement le taux d’alcool dans vos dégustations.

15 thoughts on “2 facteurs qui expliquent l’augmentation du taux d’alcool dans les vins

  1. Bonjour, j’aurais bien aimé voir la chaptalisation évoquée. Est-ce que ce n’est pas paradoxale de voir le taux d’alcool augmenter, et dans le même temps de constater que les vignerons du sud de la France demande de pouvoir utiliser du sucre de betterave plutôt que du MCR pour palier la faiblesse de sucre ?
    Autre point, cette année, qui a été faiblement ensoleillé, est-ce qu’on verra du coup des vins moins alcoolisé ?
    Merci pour toutes les infos que vous mettez régulièrement en ligne sur ce site !

  2. Merci Richard pour le commentaire sur l’article !
    A Fab : effectivement, si les vignobles du Nord peuvent recourir à la chaptalisation, c’est logiquement plus compliqué à obtenir dans le Sud. on constate que les vignobles du Sud anticipent parfois la vendange pour récolter avant la pleine maturité phénolique : cela permet de préserver la fraicheur des arômes, et d’éviter d’avoir des acidités trop basses. seulement, il faut parfois compenser en enrichissant les vins par chaptalisation.. meme dans le Sud ! l’enrichissement par Mout Concentré (MCR) est beaucoup plus cher, donc on comprend qu’on lui préfère souvent le sucrage (par contre, il est plus difficile d’obtenir la dérogation dans le cas du sucrage)

  3. Merci pour toutes vos réponses précises.
    Sauf erreur de ma part, à l’époque de la colonisation, l’Algérie produisait justement un vin fort en alcool qui me semble t-il était en partie destiné à des mélanges avec d’autres vins français et leur donner ainsi une augmentation du taux d’alcool.
    Ne pas hésiter à rectifier mes propos.

  4. Merci pour votre article très intéressant. Il me semble que des recherches sont actuellement menées par la Grappe et l’Inra autour de la baisse du TAV ( recherchée par les consommateurs ) pour l’appellation Coteau du Layon .
    Les vins tests sont plus suaves mais ont moins d’alcool.
    Pouvez-vous expliquer les différents procédés pour parvenir à cela ?
    Merci

    Jeanne

  5. Certains vignerons chauffent le chais pour que la fermentation soit complète. Ainsi, il ne peut plus y avoir de fermentation secondaire même si le vin est entreposé dans das magasins
    inappropriés….
    Pour ma part, je ne supporte plus ces vins qui vous laissent un gout d’alcool à vous fendre la gueule. Même les grands crus sont concernés ….. et nos grands goutteurs sont muets
    !!!.
    Alors j’abandonne cette boisson.
    Et dire que certains ont traité de piquette des vins faits à la ferme, 10 degrés et non agressifs …. bien sur ils se conservaient mal …mais quel délice pour le palais.
    Le commerce à défiguré le vin et de nombreux vignerons ont perdu leur honneur pour garder la vente.

  6. ayant bu des petits vins aux plus grands vins (premiers grands crus classés de Bordeaux)je suis « catastrophé » de voir l’évolution du goût du vin (notamment dans les grands crus classés) où on ne sent plus de goût agréables mais seulement un goût « hermétique » (alcooleux ?). le climat est surtout un bon prétexte, mais la réalité c’estl’orientation du marché avec son développement vers les pays anglo-saxons, qui n’ont pas la réputation d’être très connaisseur en la matière et les fortes intensités d’alcool actuelles (14.5 ° étant de plus en plus fréquent) marquent forcément les palais.
    Jacques DERRUAU

    1. Finalement , à 15 % c’est la fin du vin de table, du vin de repas… alors pourquoi pas

      des repas au Porto ou à l’alcool, au moins avec ces breuvages on sait à quoi s’en tenir

      Finally with 15 degrees, its the end of wine as a companion of a meal. Finally why not

      drink Porto or whisky or Gin or Vodka, then we know for what we resonsible are !?

    2. Témoignage tellement à propos !

      Et les pesticides dans l’histoire ? Ne jouent-t-ils pas un rôles?
      Ces grands vins de garde (que j’ai eu la chance de gouter avec un oncle gourmet), n’ayant pas été soumis à ces traitements massifs …

      Heureusement de nombreux producteurs bio arrivent à maîtriser ce taux d’alcool tout en offrant des vins très interessant sur le plan gustatif ; des vins qui réagissent fortement avec le plat que l’on déguste, chose qui n’arrivera jamais avec 95% de la production actuelle des grandes surfaces et des cavistes … N’étant pas spécialiste je me demande quelle est la raison scientifique sous-jacente. Par contre je peux dénoncer le « coupable » : DEMETER !

      Enfin lorsque l’on déguste avec de tels producteurs ils vous répondent sans surprise qu’ils « redécouvrent » les méthode des « anciens » mais aussi des pieds des vignes « historiques ».

      @Dussoix : 100 % d’accord sur la remarque : de la vodka ?

  7. Je me souviens du vin de mon grand père….un vin de table fruité mais avec une petite acidité, que les ‘margoulins’ ont ensuite baptisé .
    Maintenant ce sont des financiers qui dirigent tout…bien sur c’est NUL.
    J’ai résolu le problème en n’achetant plus de ce vin.

    Quand je vois des amateurs acheter leur vin à la foire aux vins des supermarchés….comparer les crus, lire les pub..et choisir un vin de M… à 30 ou 50 €, je vois a quel point la civilisation est pourrie. Le ridicule ne tue pas.
    C’est la vie et le progrés…

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